Veille - Alimentation

Les tendances en marketing alimentaire sont-elles favorables à une saine alimentation?

Les commerçants en alimentation se livrent une concurrence féroce pour attirer les consommateurs : les tendances marketing actuelles sont-elles favorables à une saine alimentation?

Oui, si l’on se fie au fait que depuis mai 2014, le géant britannique Tesco a retiré les bonbons de l’espace de ses caisses enregistreuses. Oui, si l'on regarde les efforts de certaines chaînes qui s’allient avec des chefs pour inciter les consommateurs à cuisiner à la maison.

Mais pas toujours, si l’on se fie à d’autres tendances observées ici et ailleurs par Jordan LeBel, professeur agrégé au département de marketing, de l’Université Concordia1.

« Le consommateur ne vient plus faire son épicerie, il vient trouver une idée pour épater ses amis le samedi soir, pour remplir les boîtes à lunch de ses enfants. Il est à la recherche de solutions et les commerçants tentent de répondre à ce besoin en modifiant leur offre alimentaire et leur aménagement intérieur », a souligné M. Lebel.

Quelques exemples de tendances en marketing alimentaire

  • Fini les comptoirs de fruits et légumes à l’entrée des épiceries, place aux aliments préparés et prêts-à-manger, très populaires auprès des consommateurs : au Canada, en 1955, 25 % du dollar alimentaire était consacré à l’achat d’aliments préparés hors de la maison. La proportion était de 41,7 % en 2012.
  • Augmentation de l’offre de produits précoupés au comptoir des fruits et légumes.
  • Marketing croisé : par exemple, une préparation de croustade est offerte à côté des pommes et du chocolat est placé à côté des bananes.
  • Le Grocerant : un coin restaurant dans le supermarché. Aux États-Unis, ces sections de magasin génèrent un gros chiffre d’affaires.
  • Présence d’une mini-boutique de niche dans le magasin, par exemple une brûlerie de café ou une section réservée aux aliments dits naturels.
  • Espace tablette plus cher parce qu’il est situé dans le champ de vision optimal de l’acheteur lorsqu’il circule dans les allées.
  • Préparation de mets personnalisés sur place, fournis en 15 minutes.
  • Présence en magasin d’employés pouvant donner des conseils culinaires (aides-gourmets chez IGA).
  • La tendance produits locaux devient plus forte que la tendance produits biologiques : un commerçant de Sorel-Tracy est allé jusqu’à mentionner le nom du producteur local des tomates en étalage et a vu ses ventes augmenter de 50 %.

La technologie, le prochain tsunami des tendances en commerce d’alimentation

M. LeBel prévoit un virage majeur au plan technologique pour attirer les acheteurs. Quelques exemples éloquents.

  • Le « sans-friction » : Tesco, en Grande-Bretagne, offre des paniers munis d’un scanneur, qui permettent de quitter l’épicerie sans payer en personne.
  • Le Click and Collect : le client passe sa commande en ligne et vient la chercher à un comptoir à l’auto.
  • Amazon, sous la bannière Amazon Fresh a commencé à offrir la livraison d’épicerie dans plusieurs grandes villes des États-Unis.
  • Les champs en direct : dans certains magasins Whole Food aux États-Unis, de très grands écrans relayent des photos prises dans les champs où poussent les fruits et légumes vendus par cette chaîne de supermarchés certifiés biologiques.
  • Chef Watson2 : IBM a mis au point une application mobile qui guide l’acheteur en fonction de son humeur du moment « De quoi avez-vous envie? » demande-t-il. Le consommateur fait son choix puis l’application lui propose une recette tout en lui suggérant d’acheter des aliments qui correspondent au goût de ses enfants, de son conjoint, de ses amis. Puis il indique dans quel supermarché et à quel moment le client peut aller récupérer sa commande.

« Quand on sait que les jeunes savent de moins en moins que les carottes poussent dans des champs et non pas à l’épicerie, on espère que l’application Chef Watson sera développée de façon à améliorer leurs connaissances et habitudes alimentaires », a conclu M. LeBel.

Cette présentation a eu lieu au cours des 18es Journées annuelles de santé publique (JASP)3 à l’occasion d’une demi-journée intitulée « L'intérieur des commerces d'alimentation : explorer les interventions pouvant favoriser de meilleurs choix alimentaires. »

1 Jordan L. Lebel, Ph. D., est professeur agrégé, Département de marketing; directeur, Centre d’excellence Luc-Beauregard de recherche en communication, École de gestion John-Molson, Université Concordia.

2 Cette application était en phase de test au moment d’écrire cet article.

3 Les Journées annuelles de santé publique sont organisées par l’Institut national de santé publique du Québec. Elles ont eu lieu à Québec, du 24 au 26 novembre 2014.

Veille Action – 9 janvier 2013