Colloque sur les systèmes alimentaires durables à HEC Montréal
À la suite de la Journée mondiale de l'alimentation du 16 octobre 2013, la direction du développement durable HEC Montréal a organisé un colloque en collaboration avec Justice Alimentaire Montréal (JAM).
Des chercheurs, des experts de l’agriculture et de l’économie sociale ainsi que des étudiants ont échangé sur un sujet qu’ils jugent crucial : comment instaurer un système alimentaire durable et équitable, qui soit à la fois favorable à la santé de l’environnement et viable sur le plan économique.
Trois thèmes de fond ont été abordés au colloque : distribution alimentaire, alimentation locale, et justice alimentaire. Voici quelques-unes des interventions des personnes présentes.
Agriculture urbaine : un enjeu incontournable pour la sécurité alimentaire des villes
« Depuis quelques années, l’importance-clé de l’agriculture urbaine est de plus en plus reconnue, alors que ce mouvement était considéré comme marginal il y a 10 ans, tout comme le principe de justice alimentaire », a expliqué Christopher Bryant, professeur titulaire au Département de géographie de l’Université de Montréal. Pour cet expert du développement durable et des milieux ruraux, la réflexion sur les systèmes alimentaires urbains doit être menée sur la base d’une « ville régionale ».
L’importance de l’agriculture urbaine, Charity Hicks, coordonnatrice du groupe de travail Detroit Food Justice en sait quelque chose. « C’est un levier très puissant dans une ville en crise comme Détroit. En plus de donner accès à des aliments sains, faire pousser des légumes renforce l’estime de soi des jeunes et leur lien avec la nature », a-t-elle insisté.
Qui décide de ce que nous mangeons?
« Dix entreprises gigantesques font la pluie et le beau temps au sein des systèmes alimentaires mondiaux, a déploré M. Robert Laplante, de l’Institut de Recherche en économie contemporaine (IREC). De plus, au Québec, les 3 grands distributeurs qui contrôlent le marché ne vendent pas des aliments pour nourrir leurs clients, mais quadrillent plutôt l’épicerie en fonction d’un rendement au pied carré. »
Selon lui, il est crucial que les circuits courts d’approvisionnement soient contrôlés par des entreprises d’économie sociale, un avis que partage Martine Vézina, professeure agrégée au Service de l’enseignement du management des HEC. « Les entreprises d’économie sociale cherchent à changer les institutions et les valeurs de la société, en transformant les règles du marché. »
C’est notamment le cas à Detroit où le groupe d’achat de la Ujamaa Food Coop permet à ses membres d’acheter des aliments sains à bon prix. Au Québec, le regroupement d’achats de produits maraîchers frais Bonne Boîte Bonne Bouffe a la même mission.
Les universités et les aliments sains et locaux
« À l’Université Concordia, un effort constant est fait pour offrir des aliments sains, locaux et à bon prix aux étudiants », a déclaré Satoshi Ikeda, professeur au Département de sociologie et d’anthropologie.
Au campus du centre-ville (Montréal), on peut en effet manger une soupe végétalienne au People’s Potato, un repas équilibré ou végétarien à la cafétéria Zest, des mets biologiques au Frigo Vert (coopérative gérée par des étudiants) et un repas végétalien à 2 $ un soir par semaine au Mother Hubbard's Cupboard. De plus, les étudiants du campus de Loyola peuvent manger un repas sain et végétarien gratuit en automne et en hiver au Loyola Luncheon.
Le Pr Ikeda a insisté sur l’importance de favoriser des aliments sains et locaux pour reprendre du pouvoir sur ce que nous mangeons et nous dégager de l’influence néfaste des aliments transformés qui occupent la majorité des tablettes à l’épicerie.
Plusieurs autres universités au Québec et au Canada, souvent sous l’impulsion des étudiants, font également des efforts pour favoriser l’accès à des aliments plus sains. Par exemple, 27 distributrices alimentaires offrant une majorité de collations santé sont maintenant installées sur les différents campus de l’Université de Montréal. C’est Ma santé au sommet, un groupe qui fait la promotion de la santé sur le campus, qui pilote ce projet.
Des pistes de solutions
Parmi les pistes de solutions dégagées par les participants aux différentes tables rondes de la journée, le partage des connaissances et la collaboration des acteurs du système alimentaire ont été mentionnés par plusieurs.
Les chercheurs sont notamment invités à faire de la recherche bien arrimée aux besoins réels des agriculteurs qui veulent développer les circuits courts. C’est ce qu’ont fait le Pr René Audet et Mahdiah El-Jed, de l’UQAM, en se penchant sur la façon dont les marchés de quartier de Montréal contribuent à une transition sociale et écologique du système agroalimentaire.
Un partage des bons coups et des connaissances permettrait aussi de mettre fin aux projets menés en silo.
Pour finir, la transition vers des systèmes alimentaires plus sains, plus équitables et plus durables, est amorcée, mais elle demande une persévérance ancrée dans une vision à long terme des enjeux alimentaires locaux, régionaux, mais aussi mondiaux. Pour en savoir plus, consulter notre fiche Vers un système alimentaire local, durable, et axé sur la santé.
Veille Action - 14 novembre 2013
