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Les campagnes de santé publique et leur effet sur la prévalence de l’obésité: une critique (capsule 327)

logo de Kino-Québec La réduction de la prévalence de l’obésité est actuellement la cible principale des efforts de santé publique dans la majorité des pays industrialisés.

Pourquoi? En raison de l’augmentation de la prévalence de l’obésité liée à des changements sociaux qui ont mené à une baisse de la pratique d’activités physiques, et à l’augmentation de la consommation d’aliments hypercaloriques.

Les stratégies consistent en quelque sorte à recommander de manger moins, d’améliorer la qualité de l’alimentation et de faire plus d’activités physiques. L’objectif principal est de maintenir un poids optimal, et ces stratégies visent généralement l’ensemble de la population.

Action communautaire et marketing social

À ces stratégies nationales s’ajoutent des actions à l’échelle communautaire à l’intention de communautés (villages ou banlieues) et de petites unités sociales (école, milieu de travail, etc.). Il peut, par exemple, s’agir de changer le menu à la cafétéria d’une école ou encore d’offrir des cours de cuisine aux familles d’un quartier défavorisé.

Les campagnes de marketing social ont pour objectif de susciter des changements de comportements. Or, la plupart des actions communautaires et des campagnes de marketing social ciblent toute la population, plutôt que les individus ayant des problèmes de surplus de poids ou d’obésité. De plus, elles ciblent généralement l’alimentation et l’activité physique, bien que quelques-unes visent la réduction du stress et l’adoption de meilleures habitudes de sommeil.

Il n’y a pas de preuves solides que ces interventions sont efficaces pour la réduction ou le maintien du poids, surtout à long terme. Les effets les plus marqués seraient chez les enfants, dont les comportements sont généralement plus faciles à modifier. Les campagnes de marketing social axées principalement sur la réduction du poids n’obtiennent pas les effets escomptés. De plus, elles peuvent contribuer à l’obsession de la minceur, ce qui pourrait être nuisible à plusieurs personnes, notamment aux adolescentes et aux jeunes femmes.

Médicament et chirurgie?

La première approche faite auprès d’un individu obèse par un professionnel de la santé vise habituellement un changement des habitudes de vie (alimentation et activité physique). Les résultats n’étant pas toujours satisfaisants, il faut parfois avoir recours à un traitement pharmacologique ou à une chirurgie bariatrique. Les traitements pharmacologiques n’ont pas, à ce jour, mené à des résultats prometteurs (perte de poids de seulement 5 %). De plus, beaucoup d’effets secondaires indésirables ont été notés. Certains médicaments ont même été retirés du marché en raison d’effets secondaires graves.

Contrairement à la pharmacologie, la chirurgie bariatrique s’avère efficace pour la perte de poids, la réduction du risque de certaines maladies chroniques (diabète de type 2, maladies cardiovasculaires, etc.) et la diminution de la mortalité. Cependant, ce type de chirurgie est réservé aux cas d’obésité morbide ou aux personnes dont l’état de santé générale l’exige. Là aussi, des effets secondaires importants peuvent se manifester.

Agir sur l’environnement

Étant donné les nombreuses incertitudes quant à l’efficacité et à l’accessibilité de ces différentes interventions sur la réduction de la prévalence de l’obésité, il est urgent de trouver d’autres actions basées sur des données scientifiques. Comme les stratégies visant les changements de comportements des individus sont peu efficaces, il serait préférable d’agir sur l’environnement. Il faudrait, par exemple, réduire l’accessibilité aux aliments de moins bonne valeur nutritive, augmenter celle des fruits et des légumes, aménager des parcs et mettre en place des installations pour la pratique d’activités physiques et sportives.

La modification d’un environnement (physique, socioculturel, politique ou économique) pourrait nécessiter des changements législatifs. Bien que peu étudiés en ce qui concerne la réduction de la prévalence de l’obésité, des changements législatifs sont à l’origine de plusieurs effets bénéfiques dans d’autres sphères de la santé publique, notamment la diminution du tabagisme et l’augmentation du port de la ceinture de sécurité en voiture.

Une stratégie

Frieden et ses collègues (2010) ont proposé 3 volets à une stratégie de réduction de la prévalence de l’obésité :

  • ajuster le prix des aliments en diminuant celui des fruits et des légumes, et en taxant les aliments de faible valeur nutritive;
  • augmenter l’accessibilité aux aliments de meilleure valeur nutritive, et réduire celle des aliments de moins bonne valeur en restreignant la vente de certains aliments;
  • améliorer l’image des aliments de bonne valeur nutritive (pour qu’ils deviennent la norme sociale) en les mettant à l’avant-plan et en indiquant la valeur nutritive sur les menus de restaurants.

Ce type de changement nécessitera l’aide d’une multitude d’acteurs en dehors du système de la santé, et devra certainement faire face au puissant lobby du secteur agroalimentaire. Des mesures législatives pourront toucher la majorité de la population, comparativement aux campagnes de santé publique qui ont tendance à n’influencer que les personnes ayant un niveau élevé de scolarité. De plus, des changements législatifs risquent moins de stigmatiser les personnes obèses que les campagnes de prévention.

Rédaction : Véronique Ouellet St-Denis, Karima Djellouli et Guy Thibault - Kino-Québec

Référence

Walls HL et coll. (2011) Public health campaigns and obesity – a critique, BMC Public Health 11(136):1-7.

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